Un risque accru de mariages d’enfants, de déscolarisation et de détresse psychologique pèse sur le quotidien des jeunes femmes dans le nord-ouest de la Syrie. Tel est le constat de la dernière étude In Harm’s Way de Plan International et de Women Now for Development, réalisée auprès de 170 participant.e.s – filles, mères, pères, personnels de santé et éducatif – entre mars et mai 2021, et  publié le 25 novembre à l’occasion de la journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes.

Aujourd’hui, environ 1 adolescente sur 3 va à l’école (69 % restent non scolarisées). Avant le conflit en 2011, 97 % des enfants en âge de fréquenter l’école primaire étaient scolarisé∙∙e∙s. La plupart des établissements scolaires du nord-ouest de la Syrie sont encore opérationnels, mais les problèmes de sécurité, les déplacements continus, les mariages d’enfants et les obligations familiales, telles que les travaux ménagers et la prise en charge des fratries empêchent encore les filles de suivre les cours.

Privées D’ÉDUCATION, mariées précocement ET de force

Toutes les adolescentes interrogées déclarent que la pandémie de Covid-19 aggrave leur situation : beaucoup d’entre elles ne peuvent toujours pas participer aux cours en ligne. 

En raison du conflit, les données fiables restent rares, mais une enquête menée auprès de jeunes femmes syriennes déplacées au Liban révèle que 41 % d’entre elles ont été mariées avant l’âge de 18 ans. En 2006, 13 % des Syriennes étaient mariées avant leur 18 ans dans le pays et 3 % des filles l’étaient avant leur 15e anniversaire (ONU). 
Selon la loi syrienne, l’âge minimum légal du mariage est de 17 ans pour les filles, mais des lacunes juridiques autorisent le mariage d’enfants dans certaines conditions, comme celle du « meilleur intérêt ».     

Interrogées, 43 % des mères déclarent que, bien qu’elles s’opposent au mariage des enfants en temps de paix, en temps de conflit, il constitue un moyen de protéger les filles du harcèlement et de la violence, tout en allégeant la charge économique de la famille, en particulier lorsque cette dernière est gérée par une femme. Presque toutes les adolescentes rencontrées s’opposent mariage d’enfants et déclarent en moyenne, que l’âge minimum légal devrait être de 20 ans. Il est pour elles plus important de poursuivre leur éducation et d’acquérir des expériences de vie, avant de se marier. Toutefois, le contexte d’urgence explique qu’un quart des filles estime que le mariage précoce représente un moyen d’échapper à la violence domestique et à la pauvreté.    
« Notre recherche peint un tableau déchirant de la réalité actuelle en Syrie. Les filles sont encore une fois les premières victimes de la guerre : les inégalités de genre se sont accentuées au cours des années de violences. Les familles sont obligées de fuir leur foyer et de reconstruire leur vie, souvent plusieurs fois », explique Hiba AlHejazi, responsable du plaidoyer et de l’influence au sein de l’ONG Plan International en Jordanie.

SYRIE : UNE DES URGENCES HUMANITAIRES LES PLUS COMPLEXES

Le nord-ouest de la Syrie est la zone plus touchée avec :

Premières Victimes des violences

La crise continue d’affecter en premier lieu les femmes et les adolescentes. Le conflit renforce le discours patriarcal et contribue à accroître les inégalités et les discriminations auxquelles les filles du nord-ouest de la Syrie sont confrontées quotidiennement : impossibilité de se déplacer librement dans leur quartier en raison du risque d’enlèvement et d’harcèlement sexuel et la persistance de stéréotypes sexistes qui les cantonnent aux tâches domestique, à l’isolement, au manque d’intimité… 

Pour environ un tiers des personnes interrogées (32 %), les mariages d’enfants expliquent les taux d’automutilation et de suicide en hausse dans le pays.
« Le mariage précoce est l’une des principales causes des problèmes psychologiques des filles. Elles deviennent plus agressives ou dépressives en raison de leur incapacité à faire face à leurs nouveaux rôles et responsabilités. Dans certains cas, elles envisagent même le suicide comme une solution à leur misère », témoigne un travailleur social du nord-ouest de la Syrie. 

L’exacerbation de la violence : la puberté forcée

Une dernière tendance alarmante et en augmentation : la puberté forcée. Cette dernière consiste à injecter aux adolescentes des hormones pour provoquer la puberté à des fins de mariage d’enfants ou d’exploitation sexuelle (UNFPA 2020). Une pratique en hausse observée par le corps médical, mais dont la prévalence est encore niée par les communautés.
« La puberté forcée est un acte très préjudiciable pour les filles, qui affecte leur santé sexuelle et reproductive et leur mental », rapporte une gynécologue du nord-ouest de la Syrie.

 « Que l’on évoque les mariages forcés ou l’abandon de l’école, les adolescentes syriennes paient un lourd tribut à ces normes de genres néfastes et discriminatoires. Elles restent invisibilisées et leurs besoins continuent d’être négligés par la communauté internationale. Si les efforts pour protéger et sauvegarder les droits des filles ne sont pas renforcés, c’est toute une nouvelle génération de filles qui risque de rentrer dans l’âge adulte sans avoir eu l’opportunité d’aller à l’école, de devenir économiquement indépendantes et de contribuer de manière significative à la société. Et c’est la société au sens large, la consolidation de la paix et le développement à long terme qui risquent d’être profondément affectés », rappelle Hiba AlHejazi.

CE QUE L’ONG PLAN INTERNATIONAL DEMANDE 

Découvrez le rapport de Plan International et Women Now for Development en intégralité

Pour toute demande d’interview : Julien Beauhaire : 01 84 87 03 52 / 07 86 45 12 10 / julien.beauhaire@plan-international.org

Téléchargez le communiqué de presse.

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