Rosemary, 53 ans, travaille au centre de soins de santé sexuelle et reproductive pour adolescent·e·s de Plan International, à Arawa, capitale de la région de Bougainville. Lutte contre le Sida, suivi psychologique des jeunes et sensibilisation à la santé sexuelle, les défis sont nombreux dans une communauté où l’éducation sexuelle est quasiment inexistante et où les droits des filles ne sont pas respectés.

Aider les autres malgré tout

« Je suis infirmière et sage-femme. J’ai dirigé mon propre centre de santé pendant 7 ans. C’était chez moi, là où je vivais avec ma famille. Mon mari était entrepreneur et c’est lui qui a construit le bâtiment pour que les gens des communautés isolées puissent bénéficier de mes services.

Mon mari a été tué en 2016. Avec ses frères et mes fils, ils étaient au mauvais endroit au mauvais moment. Ils ont été pris dans une embuscade. 5 ont été tués et 3, mes fils, ont survécu. C’était un événement très traumatisant, pour mes enfants et pour moi.

Je suis retournée dans mon village. J’ai pris 3 mois de congé et le diocèse de Bougainville s’est occupée de moi [par l’intermédiaire du réseau national des soins]. Au bout de 3 mois, ils m’ont proposé d’intégrer leur programme de lutte contre le VIH. J’ai suivi une formation de 4 mois avant de repartir à Arawa pour travailler. Même si je ne gagnais pas beaucoup d’argent, j’aimais mon travail. J’ai élevé mes enfants du mieux que j’ai pu et ils sont tou·te·s allé·e·s à l’école. Aujourd’hui, 3 de mes enfants étudient pour devenir infirmier·ères.

J’ai 6 garçons et 2 filles. Les 3 garçons qui ont vu mourir leur père ont été complètement traumatisés. J’ai dû être très forte et les obliger à aller à l’école.

Un énorme manque en matière d’éducation sexuelle

Le centre de soins de santé sexuelle et reproductive pour adolescent·e·s de Plan International est très, très important. Il est gratuit, les jeunes ont besoin d’informations sur l’éducation sexuelle et de solutions pour résoudre leurs problèmes. 

Des jeunes filles enceintes, entre 15 et 29 ans, sont envoyées ici par l’hôpital voisin. Elles ont des douleurs abdominales et généralement des problèmes avec leur petit ami. La plupart des jeunes filles veulent savoir si elles sont séropositives ou non.
Quand elles arrivent, je leur donne toutes les informations sur le VIH et la planification familiale. Parfois, elles viennent au centre avec leur petit ami.

Je fais un suivi psychologique aux jeunes filles qui ont avorté. C’est un autre sujet important, certaines filles sont obligées d’avorter dans des conditions terribles.

Nous n’avons pas de services appropriés pour les jeunes filles qui ont été violées. Elles viennent me voir car il y a un foyer d’hébergement ici. Je leur donne des kits de prophylaxie post-exposition au VIH (traitement qui, pris dans les heures qui suivent une prise de risque, réduit de façon importante le risque de contamination par le virus). J’essaie de les aider du mieux que je peux. 

Aux garçons, je parle des conséquences de l’alcool, de ses effets sur le corps. Une fois, je suis allée parler aux jeunes dans un bar et j’ai dit : « Plus vous buvez, plus vous vous empoisonnez. Regardez celles et ceux qui vous entourent, vous ne savez pas qui est infecté (par le VIH) ou non. Lorsque vous êtes ivres, vous prenez trop de risques ».

Une équipe mobile pour aller dans les villages reculés

Pour certaines personnes, il est très difficile de venir au centre. Alors, c’est nous qui nous déplaçons. Je fais partie de l’équipe mobile, nous allons de villages en villages dans le cadre d’un programme de vaccination. Des dispensaires existent dans ces régions mais aucun personnel qualifié n’y travaille.

Ces communautés apprécient vraiment que nos services viennent à elles car cela améliore la vie des gens. Les jeunes viennent me voir et m’appellent « mère ». Ils sont très heureux de recevoir de l’aide.

À Bougainville, les filles ne sont pas traitées de la même manière que les garçons. C’est culturel. Dans notre région, ils ont l’habitude de dire que les garçons sont les chefs. Les enfants et les jeunes  doivent être informé·e·s et aller à l’école. Il faut multiplier les messages et les actions de sensibilisation pour toute la communauté. »

Plan International agit pour protéger les jeunes

Le projet (SRMH) de Plan International vise à aider plus de 2 500 jeunes de 5 communautés à améliorer leur accès aux connaissances et aux services en matière de santé sexuelle, reproductive et maternelle. Le projet est mis en œuvre en partenariat avec les départements de la santé et de l’éducation de la région autonome de Bougainville.

Sur Instagram