Publié le 3 octobre 2025
Chaque année, 12 millions de filles dans le monde sont mariées avant l’âge de 18 ans, soit 23 filles par minute. Le mariage forcé n’est pas une pratique lointaine ou exceptionnelle : il touche tous les continents et prive des millions de filles de leurs droits fondamentaux. Pourtant, cette pratique, contraire au droit international, reste entourée de nombreuses idées reçues. À l’approche de la Journée internationale des droits des filles, le 11 octobre, Plan International France fait le point sur 5 préjugés sur le mariage d’enfants à déconstruire.

1. « Le mariage d‘enfants est un problème religieux »
Faux. Le mariage d’enfants n’est pas lié à une religion en particulier. Il existe dans des sociétés très diverses, aux croyances variées. Ce sont les normes sociales sexistes et la pauvreté qui en sont les principaux moteurs.
Dans de nombreuses communautés, les filles sont perçues comme des épouses en devenir dès leur puberté. Leurs sexualités, leurs corps, leurs avenirs sont contrôlés au nom de la préservation de l' »honneur » familial. Mais cela n’a rien à voir avec la religion : c’est avant tout une construction sociale profondément sexiste.
Dans plusieurs pays, comme au Népal ou au Bangladesh, des responsables religieux s’engagent aujourd’hui contre le mariage précoce, rappelant que la protection des enfants doit toujours primer sur les coutumes.
2. « Le mariage protège les filles »
Faux. C’est l’inverse. Beaucoup de familles pensent qu’un mariage peut « protéger » leurs filles d’une grossesse hors mariage, de la pauvreté ou de violences sexuelles. Mais en réalité, cela l’expose davantage à ces risques.
Lorsqu’une fille est mariée durant l’enfance, elle perd la chance de développer les compétences, les connaissances et la confiance nécessaires pour assurer sa propre sécurité, pour faire ses propres choix, relever les défis, accéder à un emploi rémunéré et construire une vie autonome. Privées d’éducation et de perspectives économiques, ces filles – et leurs familles – sont davantage condamnées à vivre dans la pauvreté. Le mariage précoce n’est donc pas une protection : c’est une violation flagrante des droits humains.
3. « Les mariages d’enfants n’ont lieu qu’en Afrique »
Faux. Le mariage d’enfants est un phénomène mondial. Il est plus fréquent dans certaines régions – comme l’Asie du Sud, l’Afrique subsaharienne ou l’Asie de l’Est et du Pacifique – mais on le retrouve dans toutes les régions du monde, sous différentes formes.
Au Portugal, par exemple, ce n’est qu’en juillet 2025 que le mariage des mineur·es a été interdit sans exception. Jusqu’à cette date, il était encore possible de marier un·e adolescent·e de 16 ans avec l’accord des parents. De l’autre côté de l’Atlantique, aux Etats-Unis, le mariage d’enfants est encore légal dans de nombreux États, rendant possible le mariage de mineur·es.
Le mariage d’enfants n’est donc ni un problème lointain, ni un héritage d’un autre temps. C’est une réalité qui touche tous les continents et frappe surtout les filles et les adolescentes issues d’un milieu social très modeste ou fuyant leurs pays à cause d’une catastrophe climatique ou d’un conflit.
4. « Ce problème n’existe presque plus »
Des progrès ont été faits. Le taux mondial de mariage d’enfants est passé de 23 % à 19 % en dix ans.
En revanche, cette avancée reste fragile. Les conflits, la pandémie, les déplacements forcés, les dérèglements climatiques et la pauvreté ont provoqué une hausse des mariages précoces dans plusieurs régions. Dans certaines zones du Soudan du Sud, en proie à une guerre civile, la proportion de filles mariées est passée de 45 % à 71 % pendant la guerre. Au Liban, 23 % des filles réfugiées syriennes sont aujourd’hui mariées, contre 8 % avant le conflit en Syrie.
Dans ces contextes, le mariage est perçu comme un moyen de “protéger” les filles ou d’alléger la charge économique de la famille. Mais il ne fait qu’aggraver les violences, l’exclusion et la pauvreté.
5. « Les mariages d’enfants ne concernent que les filles »
Pas totalement vrai. En effet, ce sont majoritairement les filles qui sont concernées par le mariage d’enfants : environ 1 fille sur 5 dans le monde est mariée avant 18 ans, contre 1 garçon sur 30. Mais les garçons peuvent aussi être concernés ; dans certains contextes, ils sont mariés jeunes pour des raisons de pression sociale ou d’alliance familiale.
Cependant, les conséquences ne sont pas les mêmes pour les filles et pour les garçons. Les filles mariées très jeunes subissent souvent des violences psychologiques, physiques ou sexuelles, des grossesses précoces et l’arrêt de leur scolarité. Elles sont enfermées dans des rôles domestiques et mariées à des hommes beaucoup plus âgés, ce qui accentue le déséquilibre de pouvoir. Les garçons, eux, conservent plus souvent la possibilité de continuer leurs études ou leurs travails. Les mariages d’enfants sont donc avant tout une atteinte aux droits des filles.
Comment Plan International lutte-t-elle contre le mariage d’enfants ?
L’ONG Plan International agit à plusieurs niveaux pour prévenir et éliminer les mariages forcés et précoces :
- Agir sur les causes : en favorisant la scolarisation des filles, en aidant les familles à gagner leur vie, en sensibilisant les communautés et en luttant contre le sexisme.
- Renforcer la loi : en plaidant pour des législations claires, sans exception, qui interdisent le mariage avant 18 ans, et pour leur application effective.
- Soutenir les filles mariées : en leur garantissant un accès à l’éducation, à la santé sexuelle et reproductive, à la justice, à des espaces sûrs et à des programmes de réintégration scolaire.
- Mobiliser : en impliquant les filles et les garçons, les leaders communautaires, les enseignant·es et les décideur·euses dans des projets collectifs de prévention.