Les chiffres sont sans appel : 90 % des filles réfugiées à Beyrouth, en provenance de Syrie, de Palestine et du Liban majoritairement, révèlent se sentir en insécurité la nuit, 70 % estiment être en danger lorsqu’elles sortent en ville et plus de la moitié craignent de se retrouver seules et isolées. Après ses rapports sur la situation des adolescentes au Bangladesh (réfugiées rohingya), au Soudan du Sud et au Lac Tchad, l’ONG Plan International donne à nouveau la parole aux filles en situation de crise humanitaire dans un 4e rapport, Adolescentes en danger : Les voix des refugiées de Beyrouth.

© Plan International

L’ONG Plan International place à nouveau au cœur de sa stratégie d’urgence la voix des adolescentes survivantes des conflits. Entre octobre et novembre 2018, 400 filles âgées de 10 à 19 ans ont été interrogées sur leurs conditions de réfugiées à Beyrouth. 

L’objectif ? Redonner leur voix à ces adolescentes, restituer leur quotidien et porter leurs recommandations en matière d’aide humanitaire d’urgence. Elles y témoignent aussi de leur espoir d’un avenir meilleur.                                                                

Victimes de violence 

Dans les camps de réfugié·e·s, la violence et la peur constituent le quotidien des jeunes filles. Plus de 50 % d’entre elles déclarent être victimes de violences physiques et sexuelles, de harcèlement et d’agressions verbales. Les représentant·e·s de la société civile à Beyrouth font état d’une violence permanente et généralisée à leur encontre.

« Nous avons trop peur pour sortir seules. Il y a toujours des hommes ivres qui nous harcèlent et même ceux qui ne le sont pas nous harcèlent », rapporte une Syrienne de 18 ans qui vit dans le camp de Bourj Al Barajneh, situé à l’ouest de la capitale. Une jeune Libanaise, âgée de 10 ans, confie également son sentiment d’insécurité dans le camp de Bourj Hammoud, au nord de Beyrouth : « Il y a des enlèvements d’enfants et de filles : je n’aime pas quitter notre maison ».

Les transports en commun constituent des milieux particulièrement hostiles pour les jeunes filles : 45 % d’entre elles ne s’y sentent pas en sécurité et 24 % y sont victimes d’attouchements.
Cette peur de la violence renforce un sentiment profond d’isolement : plus de la moitié des filles interrogées confient se sentir très seules.

Le Liban : terre d’accueil des réfugié·e·s

© Plan International

Le Liban accueille le plus grand nombre de réfugié·e·s par habitant au monde : en avril 2019, le Haut Commissariat des Nations unies  pour les réfugiés estimait à 239 005 le nombre de réfugié·e·s enregistré·e·s à Beyrouth, soit presque 11 % de la population totale. Parmi eux, près de 1,5 million de réfugié·e·s qui ont fui récemment la guerre civile syrienne, ainsi qu’un grand nombre de familles palestiniennes présentes dans le pays depuis 1949.
Majoritaires, les réfugiés palestiniens et syriens vivent aux côtés de réfugiés d’autres pays, ainsi que de travailleurs migrants issus de milieux économiques défavorisés. 

Les infrastructures et les ressources demeurent insuffisantes et provoquent des tensions intercommunautaires : les populations se disputent l’accès au logement, à l’emploi et aux moyens de subsistances. 

Mariées de force et privées d’éducation 

Les mariages d’enfants sont en augmentation dans les camps : 10 % des filles interrogées se retrouvent fiancées ou mariées de force. Les parents craignent pour la sécurité de leurs filles et espèrent que le mariage les protègera. Un grand nombre d’entre elles signalent que leurs amies ont été mariées de force, comme en témoigne une jeune Syrienne de 13 ans du camp de Bourj Al Barajneh: « Certaines filles ont des parents qui les obligent à quitter l’école pour se marier. Mes amies se sont toutes mariées et certaines ont des enfants »

De nombreux parents refusent à leurs filles d’aller à l’école, de peur qu’elles s’y trouvent en insécurité. Résultat : un décrochage scolaire dès l’âge de 14 ans. Alors que 80 % des filles de 10 à 14 ans vont régulièrement l’école, seulement 39 % des 15 à 19 ans sont scolarisées. 

Contrairement aux garçons, elles doivent rester enfermées chez elles. « Mon frère a beaucoup plus de liberté que moi », confie une Palestinienne de 16 ans. Elles ne peuvent ni se sociabiliser ni demander de l’aide. Cet isolement les empêche d’accéder aux soins de santé de base, à l’information et à la formation professionnelle.  

Résilience

 Malgré  des conditions de vie très difficiles, l’ONG Plan International souligne l’ambition et l’optimisme des filles. L’origine de cette capacité de résilience ? L’éducation, qui constitue un vecteur d’émancipation et un outil indispensable pour améliorer leurs conditions de vies dans les camps. 

« L’importance que les filles accordent à l’éducation est évidente », souligne Colin Lee, directeur des programmes régionaux de Plan International au Moyen-Orient, « Beaucoup de filles ont exprimé le désir de devenir avocate, médecin ou ingénieure. Mais, ce qui est encore plus frappant, c’est qu’elles ne croient pas que l’éducation leur profitera à elles seules : elles y voient aussi un moyen de soutenir et d’améliorer la résilience de leur communauté et de la société dans son ensemble. »

Recommandations de l’ONG 

Plan International appelle les gouvernements, les Nations unies, les acteurs de la société civile et le gouvernement libanais à s’attaquer aux causes de l’insécurité des filles et recommande de : 

Les adolescentes restent les plus vulnérables face aux dangers liés aux crises humanitaires : kidnapping, violences et abus sexuels, esclavage, déscolarisation massive… En situation de crise, les filles sont 2,5 plus à risque d’être déscolarisées que les garçons. Partout dans le monde, elles veulent faire entendre leur voix et leurs revendications ! Plan International les soutient.

Contact médias (données, photographies, interviews des équipes sur place…) :
Julien Beauhaire – 01 84 87 03 52 –
julien.beauhaire@plan-international.org

Lire le communiqué de presse.

Suivez-nous

Sur Instagram